Conditionner une construction à 3+2 — les solutions d’Ilzer, Rose et Potter

Matthieu Monteiro
16 min readJan 19, 2024

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Retour sur certains principes fondamentaux qui permettent de faire performer un bloc médian tout en restant proactif défensivement face aux très répandues constructions à 3+2.

Au haut niveau, certaines tendances footballistiques se révèlent éphémères et n’influencent finalement les entraineurs que sur une période assez courte. D’autres quant à elles, arrivent cependant à s’ancrer concrètement dans le temps. Et construire avec une première ligne de 3 éléments pour enclencher un moment d’organisation a en effet surement dépassé le cadre de la simple tendance. Tant les avantages ont été démontrés à répétition ces dernières années.

Il y a quelques mois sur cette même page, nous avions listé les raisons majeures d’un tel plébiscite :

« Le profil des joueurs qui composent désormais ces premières lignes de trois joueurs attestent assez bien des objectifs tant offensifs que défensifs. Entre le classique décrochage du milieu défensif entre les centraux ou sur la largeur tel un défenseur central extérieur et, de manière toujours plus fréquente, un des latéraux qui maintient sa position pour former cette ligne de 3. Témoignage d’une première ligne qui n’est donc plus réservée qu’aux défenseurs centraux. Mais désormais à d’autre type de profil pour notamment valoriser ce moment de construction. Un milieu qui décroche pouvant apporter sa qualité dans les transmissions. Alors qu’un latéral pourra lui faire plus progresser son équipe par la conduite. Sans oublier que l’exigence envers les défenseurs centraux à la relance a elle aussi, beaucoup augmentée. Les profils évoluent, se diversifient et la première phase de construction en profite.

Avec ballon, cette organisation à trois éléments en construction est ainsi supposée offrir : une supériorité numérique et positionnelle pour que l’un centraux puisse progresser balle au pied ; une meilleure circulation du ballon d’un côté à l’autre ; plus de fluidité dans les transmissions ou encore différents angles de passe pour se mettre en relation avec le reste du bloc. Défensivement, cette disposition permet aussi de mieux contrôler les moments de perte de balle. En protégeant notamment mieux le couloir central. Et en ayant des couvertures et distances entre les joueurs plus proches qu’avec une ligne de 4. Cette dernière comportant pourtant un élément supplémentaire. »

Un papier à l’époque qui mettait ainsi en évidence une autre tendance à valeur de solution et qui consistait à conditionner cette construction à 3 par une première ligne de 3 éléments offensifs. Etant donc prêt à se calquer et à gêner la circulation par ces références individuelles.

Cette tendance a cependant nettement moins durée. Car comme évoqué dans l’article de l’année dernière, la construction avec une première ligne de 4 éléments s’est avérée largement plausible face à ce problème. Tenant sur la largeur et continuant à fournir principalement cette supériorité d’un joueur, cet homme libre, si chère au jeu de position. Capable d’exploiter ensuite les faiblesses des systèmes composés d’une première ligne de pression constituée de 3 éléments si cette dernière est surpassée.

En 5–2–3, la largeur sera plus ou moins contrôlée au niveau de la ligne défensive mais les milieux auront une zone très importante à gérer pour empêcher la progression adverse. Le contraire en 3–4–3 avec une ligne défensive qui s’exposerait à une infériorité numérique et à une exposition tant de la largeur que de la profondeur extérieure en cas d’un plan de jeu plus direct de l’adversaire. Le 4–3–3 reste surement l’organisation la plus équilibrée dans cette situation. Mais reste relativement exposé sur la largeur au niveau de toutes les lignes. Sans une culture forte et capacité concrète à réaliser ces efforts au moment de presser pour n’avoir quasiment jamais de temps de retard, telles les plus grandes heures du Liverpool de Klopp, les faiblesses de cette approche vis à vis de la première ligne de pression surpassent, d’un point de vue personnel, tout de même assez nettement ses forces.

Ainsi, ce départ à 3 éléments sur la première ligne de construction reste une problématique à résoudre, ou au moins à contraindre, de manière bien plus franche.

Cette construction au niveau de la première ligne s’accompagnant ensuite naturellement d’un soutien au milieu de terrain. Parfois par une unique sentinelle. Parfois par deux éléments. Et c’est cette deuxième configuration qui va nous intéresser aujourd’hui.

Car associée à cette construction à 3, la combinaison en 3+2 offre notamment :

  • une sécurité plus importante en cas de perte de balle rapide dans son camp via ces 5 joueurs qui couvrent quasi à chaque instant le couloir central
  • une sécurité en cas de perte de balle mais dans le camp adverse avec cette occupation toujours aussi équilibrée pour prévenir la transition défensive plus haut sur le terrain
  • plus de confort pour les centraux extérieurs afin de conduire balle au pied sachant qu’il y a de nombreuses couvertures potentielles pour soutenir ce comportement
  • une organisation qui par ces 2 milieux, attire régulièrement 2 joueurs adverses (en plus de ceux qui sont responsables de conditionner la première ligne de 3) afin de tenter d’empêcher toute progression par l’axe. Mais créant souvent des espaces dans leur dos exploitables par les éléments offensifs
  • un joueur de plus au milieu capable de faire ce lien entre les secteurs afin notamment de renverser à l’opposé si la construction part d’un côté bien précis

Sans être bien évidemment l’unique façon de commencer à construire et de débuter ses offensives en organisation, la construction à 3+2 continue de s’adapter à de nombreux profils de joueurs et d’équipes au haut niveau.

Sans atteindre cette qualification en Ligue des Champions la saison dernière, Liverpool a su changer la dynamique de sa fin de saison par le passage à cette construction à 3+2. A travers notamment du repositionnement axial avec ballon de Trent Alexander Arnold au milieu. Le premier sacre en Ligue des Champions de Manchester City restera quant à lui, éternellement marqué par les performances d’un John Stones positionné au milieu aux côtés de Rodri pour former cette construction à 3+2. La deuxième coupe aux grandes oreilles de Chelsea en 2021 sous les ordres de Thomas Tuchel sera aussi caractérisée par cette organisation des deux premières lignes. Et les exemples sont nombreux et cela à des échelles compétitives très différentes.

On propose ainsi d’étudier les solutions apportées ces derniers mois par trois plans de jeu construits par les entraineurs que sont Christian Ilzer (Sturm Graz), Marco Rose (RB Leipzig) et Graham Potter (Brighton). Trois plans de jeu différents mais aux nombreux éléments fondamentaux en commun pour tenter de conditionner cette construction à 3+2.

RB Leipzig v. FC Bayern : d’une libre construction à 3 vers une pression intense sur la largeur

En septembre dernier, le RB Leipzig de Marco Rose recevait le FC Bayern de Thomas Tuchel. Une confrontation qui laisse naturellement curieux et qui surprendra par le haut niveau défensif démontré par le club de Leipzig durant une large partie de la rencontre.

Le premier objectif des hommes de Rose était de ne pas aller chercher trop haut le Bayern. Mais d’attendre selon un bloc médian organisé en 4–4–2 voire en 4–2–2–2. Face au 3–4–3 des hommes de Tuchel au moment de construire, Leipzig va laisser une certaine liberté aux défenseurs centraux adverses afin de faire monter le bloc bavarois dans le terrain. Les visiteurs s’installant dans le camp adverse mais ne pouvant plus utiliser l’avantage numérique et le joueur supplémentaire qu’est le gardien de but plus bas (les cas Onana en finale de la dernière Ligue des Champions ou encore Pau Lopez sous les ordres de Jorge Sampaoli à l’OM restent encore éphémères).

Image 1. Marco Rose, entraineur du RB Leipzig depuis 2022

L’objectif suivant est de naturellement conditionner les solutions de passe à l’intérieur pour éviter toute progression par l’axe du terrain. En couvrant tout d’abord le double pivot du Bayern par le positionnement du duo d’attaquant. Démontrant que l’engagement de toute l’équipe est un comportement absolument primordial dans un tel plan. Cela permet ainsi au milieu de Leipzig de s’excentrer légèrement afin de mieux conditionner les milieux offensifs intérieurs du Bayern grâce à l’aide des milieux excentrés que sont Xavi Simmons et Emile Forsberg au départ de cette rencontre. Ces derniers finalement très à l’intérieur au départ et se positionnant à une hauteur différente que leurs milieux. Rendant plus difficile la transmission diagonale dans leur dos (d’où le 4–2–2–2 si on veut être précis). Pour résumé, un ballon au niveau du couloir central implique toute l’attention des premières lignes pour conditionner les options adverses de progression par l’axe.

Figure 1.1 RB Leipzig v. FC Bayern

Le pressing commence ensuite quand le ballon quitte naturellement l’axe et se retrouve au niveau d’un des défenseurs centraux extérieurs. Depuis leur position intérieure de départ, les milieux excentrés de Leipzig ont cette transmission vers la largeur comme indicateur de presser sur le temps de passe ce central. En l’attirant via une course oblique vers le couloir extérieur. Ensuite, le reste du bloc suit naturellement : l’attaquant de Leipzig côté ballon saute sur le milieu du Bayern côté ballon ; le milieu de Leipzig côté ballon suit le milieu offensif intérieur du Bayern côté ballon ; et le latéral de Leipzig côté ballon suit le piston/ailier du Bayern côté ballon. L’aide de la ligne de touche n’est pas négligeable et doit toujours être mentionnée dans ces moments de pressions.

Figure 1.2 RB Leipzig v. FC Bayern

Les décisions du défenseur central en possession sont désormais fortement conditionnées. L’égalité numérique et la densité recherchée est atteinte sur la largeur. Au niveau positionnel, le Bayern sera très souvent piégé. Manquant d’initiatives individuelles pour changer de rythme et résoudre les problèmes imposés ce jour-là par les hommes de Marco Rose.

Leipzig empêchera ainsi très régulièrement toute progression du Bayern sur de très nombreuses phases de construction. Et récupérant aussi par moment la possession sur ces séquences de pression pour repartir en attaque rapide. Démontrant que la proactivité défensive et le pressing sont aussi possibles à partir d’un bloc médian.

SK Sturm Graz v. Sporting CP : le 4–3–2–1 pour conditionner la construction 3+2 du Sporting d’Amorim

Toujours en ce début de saison, le Sporting se déplacera en Europa League sur la pelouse du séduisant Sturm Graz de Christian Ilzer. Et face à l’immuable 3–4–3 et la construction à 3+2 de Ruben Amorim, l’autrichien concoctera un plan intéressant et qui gênera fortement les moments d’organisation des lions durant une grande partie de la rencontre.

Image 2. Christian Ilzer, entraineur du SK Sturm Graz depuis 2020

L’un des premiers points communs entre la proposition d’Ilzer en organisation défensive et celle de Marco Rose vue précédemment réside dans le fait de ne pas aller chercher trop haut l’adversaire. Mais de rester sur une hauteur de bloc plutôt médiane au départ. Evitant ainsi la supériorité numérique potentielle offerte par le gardien. Le Sporting étant qui plus est une équipe réputée confortable lorsqu’il s’agit de ressortir depuis son premier tiers face au pressing.

La deuxième grande similarité reste la protection première du couloir central. Mais selon une forme différente et à travers là aussi d’un système plutôt vertical qu’est le 4–3–2–1. Les milieux offensifs resserrant à l’intérieur pour décourager par leur positionnement, en compagnie des trois milieux de terrain, toutes transmissions vers le double pivot du Sporting. La ligne de 3 au milieu ayant aussi le rôle de couvrir les couloirs intermédiaires et les lignes de passes vers les milieux offensifs intérieurs adverses. Tout ce petit monde attendant le moment idéal pour enclencher sa pression.

Figure 2.1 SK Sturm Graz v. Sporting CP

Cet indicateur de pression reste en effet la transmission vers la largeur et donc vers un des défenseurs centraux extérieurs. Dès que le ballon quitte le couloir central finalement. Le milieu offensif intérieur côté ballon déclenche ainsi son pressing tout en continuant à couvrir la ligne de passe vers le milieu du Sporting côté ballon. Une deuxième sécurité est apportée par le milieu offensif à l’opposé qui se déporte côté ballon pour offrir une couverture. L’avant-centre quant à lui conditionne un retour vers le libéro. Evitant une circulation rapide entre les centraux pour repartir à l’opposé. Seul le retrait vers le gardien est toléré. Le dernier vice-champion autrichien cherchant à défendre sur 5 joueurs du Sporting à travers ses deux premières lignes et ses trois joueurs offensifs. Conservant ainsi des unités précieuses pour les lignes plus reculées.

Les options de progression sont désormais limitées pour le central extérieur en possession : la conduite ou la transmission vers le piston. Cette dernière étant favorisée par Sturm Graz. Le relayeur côté ballon continuant à couvrir cette ligne de passe vers l’intérieur en attendant le temps de passe vers le piston.

Figure 2.2 SK Sturm Graz v. Sporting CP

L’indicateur est régulièrement confirmé et le relayeur impose ensuite une pression intense au piston du Sporting. Ce dernier voyant ses options en retrait et dans l’axe conditionnées par le travail préalable et les positionnements des milieux offensifs autrichiens. Et vers l’avant, la ligne défensive de Sturm Graz apparait enfin dans notre tableau. Etant en surnombre (4v3) et tâchant de contrôler principalement l’exploration de la profondeur.

Figure 2.3 SK Sturm Graz v. Sporting CP

La progression du Sporting sur ces moments d’organisation va ainsi être très régulièrement stoppée. Les autrichiens offrant un plan judicieux sur le volet de la protection de leur dernier tiers. Tout en cherchant à être proactif défensivement.

Concernant cette rencontre en particulier, trois solutions nous sont venues à l’esprit pour déséquilibrer plus régulièrement les locaux. La première, évoquée brièvement plus tôt, est celle d’une bien plus grande proactivité des centraux extérieurs dans la conduite de balle. Afin notamment de surpasser plus régulièrement cette première ligne de pression. Et de surtout fixer le milieu extérieur autrichien côté ballon, libérant ainsi le piston sur la largeur. Les centraux alignés ce soir-là que sont Gonçalo Inacio et Ousmane Diomandé étant largement capable de réaliser ce genre d’action.

Figure 2.4 SK Sturm Graz v. Sporting CP

D’une première ligne de trois joueurs assez libres pour circuler mais assez détachés finalement de l’espace effectif de jeu, ces potentielles conduites permettent le rapprochement avec le reste du bloc et de retrouver le jeu des supériorités par des positionnements plus adéquats.

Toujours dans cette configuration de la conduite de balle des centraux extérieurs, ces dernières peuvent aussi permettre d’aller chercher le piston à l’opposé selon une transmission plus longue. Attirant au préalable une partie du bloc adverse côté ballon afin de profiter d’un des grands points forts de l’organisation du Sporting qu’est l’amplitude maximale offerte sur la largeur. Appuyant sur le point faible du système vertical autrichien qu’est le manque de contrôle de cette même largeur.

Figure 2.5 SK Sturm Graz v. Sporting CP

La dernière solution envisagée enfin est celle d’un contournement du bloc plus agressif. Via un central extérieur plus écarté sur la largeur au départ et le piston côté ballon légèrement plus haut dans son couloir pour ne plus être à portée du relayeur de Sturm Graz. La transmission est difficile, grande en termes de distance et doit être assez tendue pour contourner le milieu de terrain adverse afin de progresser concrètement vers le dernier tiers autrichien.

Figure 2.6 SK Sturm Graz v. Sporting CP

Sans dire que c’est cette rencontre qui va enclencher une réflexion profonde au sein du staff des lions mais ces dernières semaines seront synonymes au Sporting d’une organisation de la première ligne inédite sous l’ère Amorim. Etant plus flexible via un passage par moment à une construction à 4 et le décrochage d’un des pistons.

Tottenham v. Brighton : Le 5–1–3–1 de Graham Potter

Au mois d’Avril 2022, en pleine lutte pour accrocher la Ligue des Champions face à son rival éternel Arsenal, les Spurs de Tottenham entrainés par Antonio Conte se feront surprendre à domicile par le très compétitif Brighton de Graham Potter. Et au-delà de la victoire 1–0 grâce à une réalisation du belge Leandro Trossard en fin de rencontre, c’est de nouveau le minutieux plan de jeu défensif qui avait été mis en valeur à l’époque.

Image 3. Graham Potter, entraineur de Brighton entre 2019 et 2022

Un plan basé sur un 5–1–3–1 défensif qui comme les animations étudiées auparavant, part sur un bloc médian et sur un conditionnement du milieu à 2 des Spurs par le positionnement rapproché dans l’axe de cette de ligne de trois au milieu.

Figure 3.1 Tottenham Hotspur v. Brighton & Hove Albion

Cependant, contrairement aux autres animations, la pression ne s’exprime pas au moment de la passe vers le central extérieur. Sur cette transmission, on est encore du côté de Brighton sur une logique de conditionnement et de prévention de la progression. Le milieu extérieur de la ligne de 3 sort uniquement au cadrage du central désormais en possession. Son positionnement cherchant à couvrir dans le même temps le couloir intermédiaire et le milieu offensif intérieur côté ballon du 3–4–3 des Spurs. Une transmission étant aussi prévenue par le central extérieur côté ballon et le piston de Brighton. Ce dernier restant légèrement à l’intérieur pour conditionner au maximum cette option de progression pour Tottenham. Enfin, la sentinelle des Seagulls apporte aussi son soutien tout en cherchant à couvrir une autre ligne de passe : celle vers Harry Kane.

Le reste des milieux à l’opposé couvrent et le travail collectif défensif étant complétement global, l’attaquant qu’est Alexis Mac Allister ce jour-là fourni évidemment l’effort de repli nécessaire pour conditionner les solutions proches en la personne du milieu des Spurs côté ballon.

Figure 3.2 Tottenham Hotspur v. Brighton & Hove Albion
Figure 3.3 Tottenham Hotspur v. Brighton & Hove Albion

Ainsi, si le central extérieur en possession des Spurs choisi de chercher son piston, un premier moment de pression est possible. Sur la largeur naturellement. Par le piston de Brighton qui presse le piston des Spurs. Et le central extérieur des Seagulls qui fait de même sur le milieu offensif intérieur de Tottenham. Cependant, le milieu de Brighton au cadrage précédemment sur le central extérieur des locaux soutien sur le côté. Fermant toutes lignes de passes vers l’axe au lieu de conditionner une passe négative vers ce dernier. Le jeu en retrait est ainsi toléré. L’accent reste ici plus porté sur l’annulation de la progression adverse lors de ses moments d’organisation offensive.

Les autres moments de pression plus intense identifiés par Brighton sont ceux passant par les milieux des Spurs. A travers certains positionnements corporelles vers leur propre but. Mais surtout par toutes transmissions négatives en retrait de ces derniers. Restant des indicateurs courant de pression pour continuer à faire reculer l’adversaire.

Figure 3.4 Tottenham Hotspur v. Brighton & Hove Albion

Une pression conjointe entre milieux (le plus axial de la ligne 3 presse pendant que celui qui est le plus proche du de la deuxième sentinelle des Spurs conditionne ce dernier) et l’attaquant. Des phases qui cherchent toujours à annihiler la progression adverse en construction et qui vont se répéter régulièrement tout au long de la rencontre.

Figure 3.5 Tottenham Hotspur v. Brighton & Hove Albion

De toutes nos approches étudiées, de nombreux principes sont communs pour affronter ces constructions en 3+2. Mais les moyens varient naturellement. Considérant les forces et faiblesses individuelles et collectives spécifiques de ces deux équipes ce 16 Avril 2022.

Lorsqu’elles sont provoquées par une certaine pression haute, les équipes d’Antonio Conte sont en effet capables dans leurs meilleurs jours de déployer ces automatismes quasi mécaniques de son 3–5–2/3–4–3 avec ballon. Pour ressortir, trouver le dos des milieux adverses par du jeu en soutien et atteindre ainsi ce troisième homme face au jeu. Avant d’attaquer ensuite l’espace en profondeur désormais plus facilement exploitable. Et cela, souvent par l’intermédiaire de ce piston projeté très haut à l’opposé. Donnant cette sensation que l’adversaire à constamment un temps de retard souvent fatal au bout.

Graham Potter optera donc pour cette ligne défensive de 5 éléments. Afin peut-être de se rassurer dans le contrôle de la largeur. Privilégiant aussi potentiellement la capacité d’un défenseur central à intervenir vers l’avant entre les lignes sur les milieux offensifs intérieurs des Spurs (tout en étant largement couvert par ses partenaires de secteur) qu’un milieu supplémentaire de couverture. Prenant en compte la capacité d’un Bissouma à couvrir plus de terrain que la moyenne des joueurs à son poste.

Impossible néanmoins de ne pas regretter l’apathie des Spurs ce jour-là pour tester plus profondément la stratégie défensive de Brighton (0.01 Expected Goals généré en première mi-temps, 0.21 Expected Goals créé avant l’ouverture du score de Trossard à la 89e minute de la rencontre). Car être mis en difficulté par un plan de jeu rondement bien préparé, c’est une chose. Mais manquer de comportements si importants comme l’exploration et la menace de la profondeur (notamment par les pistons) combiner à plus de décrochages des offensifs ou encore ne pas reconnaitre des situations de 2 contre 1 claires, notamment pour les centraux extérieurs et leurs potentielles conduites, c’est un autre problème.

Ainsi, pour récapituler, chacun de ces plans de jeu défensif vont présenter des leviers naturellement différents pour exprimer des comportements finalement très similaires entre eux afin de conditionner cette construction à 3+2. Pouvant être énumérés selon quatre grands aspects :

  • Attendre selon un bloc médian afin d’éviter dans un tout premier temps la supériorité numérique potentielle offerte par le gardien si on va chercher l’équipe adverse plus haut. Retirant ainsi cet homme libre forcément généré
  • Utiliser des systèmes plutôt verticaux à travers quatre lignes à chaque fois : 4–2–2–2 côté Leipzig, 4–3–2–1 côté Sturm Graz, 5–1–3–1 côté Brighton. Différentes hauteurs de couvertures permettant de fortement conditionner le couloir central dans un premier temps et d’avoir toujours une ligne supplémentaire comme assurance
  • Chercher à isoler la construction à 3 du reste de l’espace effectif de jeu (…)
  • (…) avant d’attendre certains indicateurs pour enclencher la pression. Lorsque le ballon arrive généralement au niveau de la largeur ou atteint un défenseur central extérieur. Afin d’être proactif dans l’annulation de la progression voire la récupération du ballon dans le meilleur des cas

Une façon de défendre qui sert face à ce type de construction en 3+2 mais qui est surtout utile face à des équipes confortables pour ressortir depuis leur premier tiers. Soit par leur individualités ou la richesse de leurs interactions collectives. Si l’entraineur estime donc qu’il n’a pas forcément les moyens ou les habitudes collectives pour aller chercher haut un tel adversaire, cette proactivité et pression en bloc médian est une option.

Les phases de pression seront moins nombreuses, les récupérations le seront aussi et moins hautes. Mais les distances des courses seront réduites, de l’énergie sera ainsi économisées, les lignes de notre bloc resteront compactes et des couvertures assez proches seront conservées. Notamment en cas de raté individuel ou d’un retard sur un timing d’intervention.

Chaque plan de jeu pesant la balance risques/bénéfices pendant sa conception. La manière étudiée ici étant plus risquée qu’un bloc plus bas très zonal qui annihile plus facilement la progression. Mais reste moins bénéfique qu’un bloc plus haut à la recherche de la récupération ou la perte rapide de la possession par l’adversaire dès le premier tiers. Cette conception du bloc médian permettra de récupérer le ballon naturellement moins haut mais restera proactif tout en étant compact en continuant d’annuler la progression de nombreuses séquences de construction adverses.

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Matthieu Monteiro
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Written by Matthieu Monteiro

Football Analyst • Chroniqueur & Rédacteur • Ingénieur Informatique

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